Selon Chris Hedges, le culte de l’illusion de nos sociétés occidentales annonce la mort de la culture et le triomphe du spectacle. D’après son dernier livre, la culture du XXIe siècle, qui met en valeur le charme superficiel, la stimulation constante, la suprématie de la consommation, détourne constamment notre attention de la réalité. Si cette analyse s’avère juste pour l’industrie culturelle, je remarque qu’elle s’applique déjà à la politique des publics de certains musées.
Le culte du divertissement masque le déclin de la culture du réel, il tente d’occulter l’insignifiance ou la vacuité de la vie, d’une certaine forme d’art, et de nous convaincre de prendre part à la grande messe régressive de la surconsommation. On baigne dans l’illusion du début à la fin. L’emballage vaut mieux que le contenu. Les individus adoptent inconsciemment les valeurs d’une culture de clichés, simplifiée à l’excès et rétrécie. Mais d’où provient-cette influence ? Cinéma, télé, porno, jeux vidéo ? Hollywood, Silicon Valley, Las Vegas ? La Californie en somme, où se tenait le dernier salon Museum & the web 2012 (San Diego) et où je me suis rendu. Et qu’est ce qu’on y a vu et entendu – mais pas seulement – ? Des sites internet « experientiels », scénographie à effets « wahou », le « storytelling » du parcours du visiteur, textes « compréhensible par un enfant de 10 ans », … Chris Hedges démontre que les individus dont la pratique sociale est fondée sur le renoncement au savoir, au pouvoir et au sens critique, n’hésitent pas à dépenser sans compter. Ce sont des consommateurs idéaux… Ceux qui devront bientôt remplacer la puissance publique pour le financement des structures culturelles, par exemple ?
Orwell craignait ceux qui interdiraient les livres. Huxley redoutait qu’il n’y ait même plus besoin d’interdire les livres, car plus personne n’aurait envie d’en lire.
Et oui on n’en est pas très loin. La culture populaire tend à mener niveler vers le bas. Vive la télévision.